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mercredi 2 septembre 2015

Recensions partitions Delatour France dans l'Éducation Musicale n°95 de septembre 2015

Recensions de partitions par Daniel BLACKSTONE
 dans l'Éducation Musicale n°95 de septembre 2015

 

CHANT CHORAL

Jean-Charles GANDRILLE : Agnus Dei  pour chœur mixte SATB a cappella. Delatour : DLT2526.
La seule difficulté de ce chœur, c'est que les voix sont très souvent divisées. Sinon, la pièce n'offre pas de difficulté technique. C'est simple et beau, mettant avant tout en valeur le texte. Pièce dépouillée et expressive, elle correspond tout à fait au souhait de l'auteur : « Par la beauté d'une musique sacrée, on peut accéder à la foi ». Est-ce à dire que la laideur de certaines pièces d'église peut la faire perdre ? Horresco referens…



CHANT

Jean-Charles GANDRILLE : Cinq Élégies.  Mélodies pour soprano et piano sur des poèmes tirés de Alcools  de Guillaume Apollinaire. Delatour : DLT2527.
Ce cycle de mélodies a été écrit en 1999, à l'âge de dix-sept ans, suite à une déception amoureuse… On trouve dans ce recueil toute la recherche de couleur harmonique et de fluidité mélodique qui caractérisent le style de l'auteur. C'est beau et… difficile !




ORGUE

Jean-Charles GANDRILLE : Pièces minimalistes pour la liturgie. Delatour : DLT2371.
Ces pièces, de moyenne difficulté et ne demandant pas forcément un gros instrument (trois claviers sont souhaitables mais deux peuvent suffire) sont destinées à l'usage liturgique mais peuvent, bien sûr, constituer aussi des pièces de concert. Le style de l'auteur est à la fois moderne et traditionnel, dans la lignée des grands organistes français du XX° siècle. Minimalistes par la taille et une certaine sobriété, ces pièces ne le sont nullement par leur qualité spirituelle.


Jean-Charles GANDRILLE : Méditation  pour orgue. Delatour : DLT2129.
L'œuvre porte bien son nom : si elle ne demande pas un gros instrument (deux claviers – pédalier suffiront), il faudra en revanche pouvoir jouer sur l'ensemble gambe/voix céleste afin d'exprimer toute la finesse et la sensibilité de cette belle pièce.
 PIANO
Hervé CELCAL : Bel air for piano.  Delatour : DIS0001.
Peut-on donner une note de « difficulté » à un tel album ? C'est avant tout l'esprit qu'il faut avoir pour se lancer dans cette musique aussi originale qu'attachante. Hervé Celcal donne à tous les pianistes, amateurs comme professionnels, les clés pour découvrir grâce à des partitions écrites comme des pièces classiques pour piano, et d'autres en version « partition jazz », la musique traditionnelle de la Martinique. Pour en savoir plus, il suffit de consulter la présentation passionnante faite par l'auteur, soit sur le site de l'éditeur, soit directement sur You Tube : https://www.youtube.com/watch?v=3BmJzfwa6DU

Jean-Charles GANDRILLE : Instants oniriques  pour piano. Delatour : DLT2528.
Notons qu'il est beaucoup plus facile de jouer ces pièces si on dispose d'une pédale de sostenuto. La première pièce, Grappes, joue, comme son nom l'indique sur les effets sonores, les résonnances, créant une émotion qui s'appuie sur la couleur harmonique. La deuxième, Raga, fait appel davantage à un langage monodique mais qui s'enrichit de toutes les résonnances créées par les agrégats sonores tenus et non joués. Ce sont des ambiances sonores à découvrir, qui incitent au rêve… comme le suggère l'auteur !

Jean-Charles GANDRILLE : Errance  pour piano. Delatour : DLT1954.
Cette courte pièce évoque « un personnage qui erre dans la plaine, contemplant les dégradés du coucher de soleil », dans la « nostalgie d'un amour perdu ». Tout est donc dans la recherche de la plus grande qualité sonore pour l'interprète, qui devra disposer impérativement d'une troisième pédale.
 HAUTBOIS

Gilles SILVESTRINI : Les Lusiades  pour hautbois seul. Très difficile. Delatour : DLT2298.
Cette œuvre illustre le célèbre ouvrage de Camðes, fondateur de la littérature portugaise qui, dans Les enfants du capitaine Grant  de Jules Verne sert au savant Jacques Paganel pour apprendre… l'espagnol ! L'auteur nous avertit : « Ma seule ambition a été de prolonger l'univers poétique de Camðes, à la fois lyrique, irréel et nostalgique. Le hautbois y est traité de manière expérimentale et quasi symphonique ». Des notes techniques accompagnent la partition.

MUSIQUE DE CHAMBRE

Jean-Charles GANDRILLE : Oblation  pour trompette en Ut et orgue. Delatour : DLT2194.
Cette très belle pièce, à la fois moderne par son écriture, et classique par son style porte bien son nom. On est séduit par l'ambiance méditative qu'elle crée et qui se déploie dans une sorte de mélopée accompagnée par de somptueux accords d'orgue. Un très bel enregistrement vidéo se trouve sur le site de l'éditeur et sur You Tube.

Jean-Charles GANDRILLE : Stèle  pour violoncelle et orgue. In memoriam Olivier Messiaen. Delatour : DLT2305.
Jean-Charles Gandrille nous gratifie d'une de ces atmosphères dont il a le secret : à la fois mystérieuse, envoutante, priante et avant tout, tout simplement fort belle. Puisque cette pièce est écrite « in memoriam Olivier Messiaen », comment ne pas évoquer ici « L'eau » (ou l'oraison) de la Fête des Belles eaux (1937) reprise dans la « Louange à l'éternité de Jésus » dans le Quatuor pour la fin du temps de 1940 ? La vidéo est disponible sur le site de l'éditeur et sur You Tube.

 

Recension du livre La traduction des émotions dans les musiques de films dans l'Éducation Musicale n°95. BDT0045

L'Éducation Musicale n°95 de septembre 2015
Recension d'Édith WEBER

Muriel JOUBERT, Bertrand MERLIER (dir.) : La traduction des émotions dans les musiques de films. 1 vol Sampzon, DELATOUR FRANCE (www.editions-delatour.com), 2015, 325 p. – 25 €.

Placée sous le double signe de la transdisciplinarité et de la complémentarité, cette publication très originale et neuve sur le plan méthodologique est centrée sur les effets de la musique de film, présentés lors des journées d'étude organisées les 18 et 19 décembre 2012 à l'Université de Lyon II. Le sujet a nécessité la participation de chercheurs venant de nombreuses disciplines : musicologie, cinématographie et histoire ; sociologie, philosophie et phénoménologie ; psychologie, sciences cognitives et neurosciences et, en outre : littérature comparée, esthétique, technique vocale chantée et parlée, sciences de la communication et de la réception spectatorielle. Parmi les intervenants, le Professeur Michel Imberty s'est imposé d'emblée par sa triple approche philosophique, musicologique et psychologique ; ses travaux serviront de références. Cette confrontation a enrichi le champ des investigations autour du mot-clé : l'émotion, un peu au sens de la théorie de l'effet de vie lancée par le Professeur Marc-Mathieu Münch.
Ce volume collectif est structuré en deux parties distinctes. La première, plus spéculative, porte sur la définition, le sens ou l'acception à donner aux mots-clés : Musique de films et Émotion. Elle pose le problème des « mécanismes émotionnels dans la fiction », puis débouche logiquement sur la traduction des émotions dans les produits audio-visuels.  La seconde partie se situe au niveau de la démonstration et de l'étude de cas et d'exemples précis. Elle présente l'émotion musicale comme « une valeur ajoutée », gravitant autour de l'expression musicale favorisant l'émotion ; l'émotion intentionnelle, entre attente et inattendu, avec les émotions musicales et la narrativité. Enfin, le chapitre conclusif : De l'oral à l'écrit aborde plus particulièrement « les relations son-image ». Tous ces constats reposent sur des exemples percutants à partir de films et de documents audiovisuels significatifs. Il n'est pas possible, dans ce cadre, d'entrer dans les détails, toutefois l'apport de ces recherches pluridisciplinaires pourrait être brièvement résumé à partir de l'Index  alphabétique) des émotions, en les classant en fonction des occurrences et de l'effet suscité par ces productions audiovisuelles évoquées lors de cette rencontre. Arrivent en tête : peur et amour, puis tension, tristesse, joie, surprise ; enfin : colère, nostalgie, haine, bonheur, dégoût, mélancolie…

Cet apport global et très développé ressort des listes portant sur « le contenu émotionnel de la musique » (p. 285) d'après Michel Imberty et les « oppositions sémantiques » de la magistrale synthèse de Muriel Joubert (p. 289-298). Complété par une imposante Bibliographie thématique, cet ouvrage collectif, avec un apport méthodologique très neuf, propose donc diverses approches d'ordre sémantique, linguistique, analytique et de très utiles « outils de représentation des relations et interactions son et image » dans le cadre de la communication audiovisuelle. Selon la conclusion de Muriel Joubert : « En somme, c'est sans doute à travers les notions d'inter-intentionnalité que s'accomplit ce prodigieux art de la synthèse sensorielle et émotionnelle qu'est le cinéma » (p. 298).
 
 

mardi 1 septembre 2015

Recension du livre de Lin-Ni Liao dans l'Éducation Musicale n°95 : Héritages culturels et pensée moderne. Les compositeurs taïwanais de musique contemporaine formés à l'étranger. BDT0046

L'Éducation Musicale n°95 de septembre 2015
Recension d'Édith WEBER

Lin-Ni LIAO : Héritages culturels et pensée moderne. Les compositeurs taïwanais de musique contemporaine formés à l'étranger.

Collection Pensée Musicale, 2015, 373 p. – 25 €. Réf. BDT0046

Sur le plan culturel, en raison de sa complexité historique, l'Île de Taïwan (ex Formose), séparée de la Chine continentale, a assimilé diverses influences : chinoise, japonaise et occidentale. Lin-Ni Liao s'attache à démontrer le glissement d'une « identité fantasmée à une identité politique », puis d'une « identité culturelle à une identité artistique ». La première partie est d'ordre historique, avec un rappel des diverses occupations néerlandaise, espagnole puis japonaise entre 1895 et 1945. Toutefois, quelques Taïwanais ont poursuivi des études musicales à l'étranger, par exemple Chang Fu-Hsing, suivi de Lee Chi-Chwan, pédagogue marqué par l'éducation occidentale. Jiang Wenye a joué un rôle de novateur dans le domaine de la musique contemporaine, Chen Su-Ti s'est spécialisé dans la musique religieuse pour piano et Kuo Chi-Yuan, dans différentes formations instrumentales. De 1945 à 1960, se produit un « vide culturel avant une ouverture très progressive », avec « une musique nationale et une musique politique », la création d'institutions : Département de musique, École nationale des Arts de Taïwan, mais aussi d'Orchestres nationaux au service de la musique classique et contemporaine. C'est surtout grâce à Hsu Tsang-Hovei que, dans les années 1960, la musique contemporaine et la critique musicale connaîtront un essor remarquable. De 1970 à 1987, une certaine « contrainte politique » se manifeste par exemple avec le Recueil des chants traditionnels populaires ; les efforts portent alors sur la collecte de chants taïwanais et la défense de l'identité nationale, associée à la fondation de la Bibliothèque musicale, à des réflexions de Shin Wei-Liang, à la création du Centre de recherche de la musique traditionnelle chinoise ayant pour objectif la renaissance de la culture chinoise lancée par des efforts pédagogiques envers des enfants doués et la création de classes spécialisées en tenant compte des enjeux sociaux. De 1987 à nos jours, la conscience taïwanaise se dégage, des changements politiques se manifestent et, progressivement, les compositeurs et compositrices s'imposent avec des programmes de musique contemporaine interprétés par des ensembles de percussions et des orchestres de chambre reflétant une « dynamique orientée vers le monde extérieur ».
Le sujet essentiel de cet ouvrage  — si riche en faits, constats accompagnés d'une abondante liste de compositeurs taïwanais ayant étudié à l'étranger — fait l'objet de la deuxième partie. Lin-Ni Liao propose une éclairante revue des musiciens taïwanais formés en Europe : Autriche et France, notamment à la Sorbonne dans les Séminaires des regrettés Professeurs Jacques Chailley et Tran Van Khê, puis de Danièle Pistone, François Picard, Marc Battier. Ils seront initiés à des esthétiques et principes compositionnels très variés, sans pour autant renier l'idée culturelle taïwanaise. Le cursus et le goût français leur ont été inculqués par Alain Weber et Allain Gaussin, sans oublier l'influence de Claude Debussy, tout en aspirant à un langage personnel. Chen Yu est un « compositeur au double cursus ». Le premier musicien formé aux États-Unis est Lu Yan. Plusieurs orientations sont représentées. La musique électroacoustique est aussi en usage à Taïwan dans les années 1960 grâce à Jean-Claude Éloy. Des œuvres s'inspirent de la philosophie traditionnelle chinoise avec, en filigrane, des matériaux culturels chinois.
Lin-Ni Liao a brassé une foultitude de renseignements, de noms, d'institutions situés dans leurs contextes musical, esthétique, politique et par rapport à un héritage culturel très dense. Pour ce faire, elle a élaboré une Table des matières qui se présente comme une revue extrêmement détaillée et précise et une claire mise en ordre (cf. p. 9-15). Ce livre est enrichi d'exemples musicaux et d'Annexes : Liste des compositeurs de musique contemporaine formés à l'étranger, Universités d'accueil (7 Tableaux), et d'une remarquable Bibliographie (p. 335-358) raisonnée et circonstanciée, ainsi que le rappel des sources primaires (divers entretiens) et d'un Index des noms et des œuvres, soit 373 pages résultant d'une Thèse dirigée par Marc Battier. Voilà de quoi instruire les historiens, musicologues, ethnomusicologues, compositeurs, sinologues, bref : tous ceux qui s'intéressent aux problèmes d'identité culturelle orientale, d'acculturation et de créations au XXe siècle et, en général, à l'influence didactique et aux glissements identitaires.